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severinethuet

Casser le sujet, Casser le tout.Ou, de la passion de la logique qui t‘inflige carrément la Passion..

Cartel du 23 Janvier 2019.

Le Séminaire Livre XV, L’acte psychanalytique, J. Lacan,

Séance du 13 Mars 1968.

Casser le sujet, Casser le tout

Ou, de la passion de la logique qui t‘inflige carrément la Passion du Christ


Le mouvement de la séance est simplissime : exposer trois raisons par lesquelles son discours psychanalytique n’est pas un discours philosophique, et en tirer la conséquence en produisant un énoncé de la nouvelle « clinique ».


Son chemin, en revanche, ce n’est pas qu’il est compliqué, ce n’est pas qu’il est inintéressant au possible, ce n’est pas que l’on n’a pas envie d’apprendre une nouvelle langue qui ne nous servira à rien d’autre, non, non, c’est surtout que l’on ne voit pas à quoi sert cette traduction si ce n’est à justifier sa passion de la logique, qui se traduit pour nous par un chemin de croix, et qui finira par le momifier dans une parole inaudible et intransmissible.

Cela fait dix années que le sujet Lacan me transporte, cela fait 2 séances qu’il me fait reculer devant ses tours de passe-passe. Jusqu’alors, dans le SIX par exemple, je passais, justement, sur ses passages-passades logiciennes, et à y regarder de plus près…


Que la logique, comme on l’a vu à la séance précédente, présente sur un plateau le sujet divisé, c’est bien, l’on voit pourquoi Lacan s’y branche, comme il peut se brancher sur l’écriture chinoise, so be it. Mais, traduire les conséquences du sujet divisé dans le langage de la proposition et de la quantification, au secours, Warum Warum Warum ?


La disjonction de l’aliénation, pourquoi pas, je préfère du texte mais bon, ça fixe, l’on ne sait quoi sans texte, mais ça fixe, c’est là quelque part.

Mais, cette pseudo barre/vel sur le S, tout ça pour commencer par schématiser que le signifiant refoulé est la vérité du sujet et le détermine, comme chez Freud en 1898 ???


Bref.


C’est parce que le sujet est effet de langage qu’il n’y a pas de cure-type et qu’ainsi son discours n’est pas de la philosophie :


Lacan va prendre position tout au long de la séance contre des philosophies, Socrate (109), Platon (113), Aristote (111), Hegel et Sartre (109), afin d’en distinguer son discours et lui enlever tout ce qui ne serait pas conforme au champ psychanalytique.

C’est pour les autres, ceux qui ne le lisent pas vraiment, que c’est de la philosophie.


Le critère de cette distinction entre discours philosophique et discours psychanalytique est le sujet, le sujet comme sujet divisé : dans le champ psychanalytique nous faisons face à l’impossibilité du savoir absolu (108), y compris pour Lacan lui-même.

Y compris pour Lacan lui-même, car, si son enseignement pour la première fois montre que l’effet de langage peut s’isoler, qu’il y a du savoir incarné (par Lacan, donc ?), Lacan ajoute immédiatement que le sujet qui tient ce discours (de quel sujet est-il question puisque le sujet n’est pas ce qui peut être mis à la place d’un individu) n’est pas nécessairement conscient c’est-à-dire complice de ce savoir (108).

Le sujet Lacan comme effet de langage (107), car c’est le reste de définition qu’on peut lui abandonner, est le sujet divisé par l’auditoire, auditoire instrument, et le désir d’enseigner, acte d’enseigner même en étant destitué, c’est le Lacan analysant qui se parle ici.


Si le sujet n’est pas face au monde comme un bloc consistant, ni l’un ni l’autre, ni face au monde dans une boîte hermétique de l’extérieur vers l’intérieur, ni consistant, le mouvement du savoir de l’intérieur vers l‘extérieur qui finirait par englober le monde n’a plus de sens.


La pensée analytique ne doit donc pas viser la totalisation de son expérience, il s’agit d’un piège (112) dans lequel il ne faut pas tomber, et qui est inadéquat à l’objet de son discours.


Et quoi de plus totalisant que le titre de l’article, avec lequel cette séance dialogue et qu’il cite ici (107), à savoir Variantes de la cure-type : d’abord il y aurait une cure-type et en plus on pourrait tout savoir de ses variantes, rien n’échapperait donc au savoir déposé là. C’est pourquoi il considérait ce titre comme étant abject (Ecrits 323, note).


C’est donc parce que son discours a pour objet l’effet de langage qu’est le sujet divisé qu’il n’a rien d’une philosophie.


I. Il n’y a pas de cure-type car le psychanalyste est un instrument :


Lacan énoncé que l’expérience dont le sujet s’autorise doit être une psychanalyse pour que le personnage puisse se dire psychanalyste (107).


Lacan emploie-t-il ici improprement le terme de sujet, comme dans la confusion entre le sujet grammatical de la proposition et le sujet transcendantal, certes nous ne pouvons pas penser une telle chose… L’usage du terme de personnage peut être d’abord expliqué par le contexte du soupçon qui pèse sur celui qui se dit indûment psychanalyste, il a ici un sens péjoratif. Ensuite, par la dimension sociale de la qualification et de la prétention institutionnelle qui lui est attachée, il a alors le sens du masque. Enfin, il peut être davantage structurel : le personnage est attaché au moi, qui se promène dans le monde et fait face aux petits autres alors que c’est le sujet de l’inconscient, sujet divisé, qui fait l’expérience qu’est l’analyse et est produit in fine comme objet.


Le seul point ferme pour l’instant, après les deux tiers du séminaire donc…, est que c’est seulement avec un psychanalyste que se pratique la psychanalyse (108). Bien…oui mais encore…


Ce n’est pas le se pratique mais le avec que commente Lacan avec Aristote :


L’homme pense avec son âme

La psychanalyse se pratique avec un psychanalyste

Donc :

l’âme est l’instrument de la pensée

le psychanalyste est l’instrument de la psychanalyse

Autrement dit :

ce n’est pas l’âme qui pense

ce n’est pas le psychanalyste qui pratique

D’où :

Le paradoxe de l’acte de l’analyste qui est un acte sans la virilité de l’activité, en jeu aussi bien dans la détermination de la pensée par Aristote (le theos est le premier moteur, pure jouissance, pur acte, et c’est la forme virile qui s’inflige la matière ) que dans la tête des personnages qui identifient position de l’analyste et maîtrise, de la situation, de l’autre, de soi, de la théorie tout aussi bien. L’analyste comme position féminine.


Il faut donc en effet étudier le rôle que joue le psychanalyste dans l’institution du sujet comme divisé et d’une façon irréductible (108) : le masque passe du côté du vrai psychanalyste…et la fin de l’analyse n’est-elle pas paraphrasée toute entière dans l’institution de cette irréductibilité ?


Son moyen tout aussi bien : le psychanalyste n’est-il pas, comme immixtion signifiante, l’instrument de la division, moyen et fin de l’analyse ?

Ce serait en effet conforme à la nature de l’expérience analytique : opération essentiellement diviseuse (112), même si cette opération est dite ici diviseuse dite à son terme. Le faire-tomber l’objet a, viser l’objet, n’est-il pas le moyen de la division finale au sens du principe.


II. Il n’y a pas de cure-type car l’analyse produit un savoir bizarre.


Le terme de l’opération essentiellement diviseuse semble au premier abord diffracté entre le terme de la tâche psychanalysante, le terme de l’acte, le terme de la réalisation du sujet, en effet :


Au terme … de la tâche psychanalysante s’ouvre … un passage à l’acte … éclairé … de savoir … qu’au terme de cet actela réalisation est pour l’instantvoilée de ce qu’il [le sujet] a de l’acte à accomplir comme étant sa propre réalisation (108).


L’exemple insistant de passage à l’acte donné jusqu’à maintenant est celui de l’installation. Terme de toute tâche psychanalysante, pas nécessairement, car le contexte est bien celui de la qualification du psychanalyste.

Lacan reprend ici le terme de passage à l’acte, qui désigne, quoi, une erreur : dans le droit fil de l’acte manqué, de l’effet de l’erreur d’interprétation de l’analyste par exemple, telles les cervelles fraîches ? Non, le passage à l’acte n’est pas l’acting-out, n’est pas adressé à l’analyste NORMALEMENT. Ce qui sort l’installation de l’institution, de la demande de reconnaissante, du papa-maman. Le passage à l’acte électif, pourrait-on dire, est le suicide : quitter la scène pour le monde. L’acte sexuel n’existe pas sauf l’inceste mère-fils qui pose un avant et un après dont le sujet ne puit sortir (SXIV). Reprendre ce terme lors de l’explicitation de l’acte alors qu’il est le terme qui véhicule, dans la langue, le saut du crime, ou de la disparition, n’est pas anodin. Ce n’est pas ainsi qu’il qualifie le mariage par exemple.


L’éclairage est celui du manque du savoir. Le savoir impliqué dans l’acte est donc le savoir du non-savoir, du savoir de l’Einfall comme ce qui échappe par définition à la maîtrise, non-savoir que la passe prétend fouiller.


La fin de l’analyse n’est la réalisation d’un savoir ni pour celui qui fait l’analyse ni pour la psychanalyste. C’est le savoir de ceci que S(A barré), qu’il s’agit de ne pas oublier de feindre qu’il n’existe pas…rôle…masque, ok.



III. Il n’y a pas de cure-type car il n’y a pas (de) tout.


Tout Frege pour montrer que le sujet n’a pas de consistance ontologique …

Ce sujet pourrait être formulé, et c’est presque drôle, comme suit : « pas … qui ne … ».

Son discours s’érige pour la énième fois contre la prétention naïve du sujet de la connaissance (112), il le dit depuis 1953, alors c’est certainement que la résistance de l’auditoire fut rude.


Ce qui est ajouté à cette répétition, outre son indexation à une passion logique désespérante car anti-littéraire donc porteuse de mort, est l’insistance sur l’illusion du « tout », le mythe, qu’il a déconstruit déjà l’année précédente sous la forme de l’idée de couple, du faire-Un.


Ceci se justifie par l’idée selon laquelle l’effet de langage qu’est le sujet implique la consubstantialité entre la constitution du sujet et l’exclusion d’une part.


D’où l’énoncé (109) de sa clinique disjonctive :


Hystérie : ou ne se reconnaît qu’à s’oublier

Obsession : ou dénie la détermination dans laquelle il se saisit


Bref.


Séverine Thuet

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