top of page
severinethuet

Hamlet le Danois ou rester à l’heure de l’Autre. Le désir et son interprétation.




La question que l'on peut se poser à partir des éléments apportés par Lacan au cours de sa lecture d'Hamlet est celle de la marge de manoeuvre analytique existante entre, d'une part, ne plus être dépendant du désir de l'Autre, et, d'autre part, disparaître devant l'objet-cause du désir. Entre ces deux positions du sujet, que reste-t-il ?


En effet, Hamlet illustre la position de celui qui dépend du désir de l'Autre, nommément qui recule devant le désir de l'Autre maternel, vraie génitale (339), sa luxure (309), con béant (339) dans lequel rentre le phallus réel de Claudius (416). C'est ce désir maternel qui est dit rendre impossible l'acte vengeur. N'est-ce pas plutôt sa jouissance que son désir d'ailleurs ? Autre réel, phallus réel, con béant : il n'y a pas de barre en l'occurrence. L'on dirait que le phallus n'est pas passé sur le plan symbolique (auquel cas Hamlet ne serait pas névrosé) : ce que la mère désire, ailleurs, dans le père, bien idéalisé quant à lui, se transfère à un autre homme, de la même génération que son père qui plus est, tout cela ne le regarde pas, ce que sa mère met dans sa béance ne le regarde pas. Pas de déclin de l'Oedipe = pas de deuil du phallus (408)).


Bref, Hamlet est dit dépendre du désir de l'Autre, se poser toujours comme dépendant de l'heure de l'Autre (384), c'est en tant que tel que son désir est celui du névrosé (342).


L'on peut donc penser que la cure vise la modification de cette donnée constitutive de la névrose. Que la cure vise le fait d'être à sa propre heure.

Pourtant être à l'heure de l'Autre est aussi une donnée structurelle, du fait de la constitution du désir relativement à la demande de l'Autre maternel et de l'impossibilité de l'effacement de l'inscription des signifiants injonctifs des Autres qui font l'inconscient. Coïncider à soi ne veut rien dire si A n'est jamais égal à A (SIX).


Justement, l'autre position est que le sujet est barré devant a, disparaît lorsque a apparaît, c'est ce à quoi se réduit l'identification chez Lacan, cet objet qui le fade. Ainsi l'homme trouve le désir à ses dépends, à la limite (307), le coup doit passer à travers lui-même (294).

a est ce que devient ce qui manque pour être soi et ne peut être subjectivé (388).

Si l'objet-cause du désir ne peut être subjectivé et désintègre le sujet, objet seulement négatif, (-phi) (414), pourquoi le chercher dans la cure ?

Quelle sorte de mort implique la traversée du fantasme ? Car il semble que c'est seulement peut-être aux portes de la mort que le sujet se saisit dans son rapport radical au signifiant (la turgescence vitale prise dans la parole), et dit "là c'était Je".

L'occasion de saisie de soi, d'identification phallique, que présente la pièce, est l'enterrement d'Ophélie (318) : apparaît Hamlet le Danois, Hamlet retrouve son désir dans sa totalité. Quand S barré est dans un certain rapport à a se produit l'identification : c'est-à-dire quand se produit le trou dans le réel qu'est le deuil de l'autre cher (397). S'y projette le phallus. Là encore le passage à l'acte d'Hamlet à cette occasion ne semble pas bien névrosé, mais plus grave que cela.


Il est difficile de saisir la différence entre la névrose normale et la névrose pathologique avec ces éléments.

Que l'apparition de a produise l'angoisse n'empêche pas qu'il puisse s'agir aussi d'un moment de puissance phallique, de joie existentielle, de je ne sais quoi qui fait acte dans la vie d'un homme, des paroles de contrat sont prononcées, des pactes d'amour sont engagés, des exaltations et des réunions platoniciennes ont lieu. Sont-ce de piètres formes d'être-là et de possession phallique ? Aimer, vivre, travailler, cela ne serait pas suffisant.


La difficulté à élaborer ces éléments provient du fait que a est ici encore imaginaire, ça fausse tout, car Ophélie devient le a d'Hamlet, or personne n'est le a tout seul, en soi, indépendamment des mêmes coordonnées de plaisir qui font précisément que l'on reste toujours à l'heure de l'Autre.


Séverine Thuet


70 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


Ancre 1
bottom of page